lundi 22 août 2011

D'ici l'on voit, les amours, la presqu'île (maquereau délicat)

La boulangerie reste fermée mais les voisins sont revenus. La librairie a installé les nouveautés de la rentrée en vitrine. Le mercredi, au marché, il y aura à nouveau la vendeuse de fruits cyclothymique dont j'aime les petites poires parfumées, les pommes replètes et le raisin croquant. Déjà les fruits de l'automne!
Pendant cet été sans bains de mer (mais la seule idée de me retrouver sur une plage bondée apaise immédiatement ce regret. Par contre, j'aimerais tellement débarquer au bord d'un lac désert entouré d'une forêt de résineux. Il y aurait un petit ponton et l'eau serait juste tiède. C'était juste comme ça en Suède au mois d'août l'an dernier, un soir par hasard, quand nous nous sommes décidés à quitter la grande route et à emprunter un chemin poussiéreux. Je portais un pull couleur carott cake, j'avais pris le maillot à fleurs et on pouvait indéfiniment s'éloigner du bord sans jamais perdre pied), il y a eu la séance de Melancholia (j'ai adoré la simple idée du fil de fer enroulé sur la branche de bois pour savoir si Melancholia s'éloigne ou pas, comme à la Renaissance) suivie d'un burger/champagne en terrasse, il y a eu son retour et les canelés parfaits qu'il a sortis de son grand sac, il y a eu des moments de désarroi immense pendant lesquels, allongée sur la couverture bleue décorée de fleurs japonaises, je me suis écroulée en fixant le plafond de mes yeux épuisés.
Lui a quand même su enchanter l'air de rien cet été immobile et concentré. Il a monté des étagères dans mon bureau et j'ai pu empiler mes livres de photos, il a trouvé un miroir de sorcière comme j'ai toujours rêvé (il adore l'idée de se voir dedans sans en être en face), il nous conduit à Tanpopo le samedi soir goûter le menu intitulé Promenade des émotions de l'été, il offre sans raison apparente un livre sur New York et surtout, il ne laisse transparaître aucune angoisse alors même que la situation est parfois critique.
Un samedi après-midi, dans une jolie boutique avec du parquet ancien très épais et de belles orchidées à côté des présentoirs à bijoux, la vendeuse nous fait respirer des bougies parfumées. Elle retourne d'un geste sec et précis chaque pot de verre sur un petit coussin en velours côtelé très fin et nous présente le fond du bougeoir. Les parfums délicats évoquent à chacun un souvenir personnel "Des petits pois que l'on vient d'écosser" "Une plage dans les Landes" "Le mimosa du jardin" "Un balcon fleuri". J'ai un peu hésité mais je ne regrette pas d'avoir choisi Freesia. Je n'aime rien tant que les grands bouquets de fleurs blanches.


Une recette aussi rapide que le temps que vous aurez pris à lire ce si court billet, une recette éprouvée par Camille, qui n'est pas sans aimer les choses désuètes, je crois. Une recette parfaite pour les retours de marché, radio forcément allumée dans la cuisine dont vous aurez ouvert la fenêtre en grand.

Le maquereau laqué comme une anguille unagiPour 2 personnes

-2 maquereaux dont vous aurez levé les filets
-0,5dL de sauce soja
-1 CS de vinaigre de riz
-1CS de sucre

Faire bouillir le soja, le sucre et le vinaigre jusqu'à ce que le mélange réduise de moitié. Laisser refroidir.
Lever les filets ou se concentrer sur la radio (ah, la voix disparue de Maurice Garrel) si c'est déjà fait.
Faire mariner une demi-heure le poisson dans la préparation désormais refroidie.
Griller les filets une minute à feu vif côté chair puis une minute côté peau, hors du feu.
Servir avec du riz (cuit à la vapeur, c'est impératif!), quelques rondelles de concombre, une tasse de genmaïcha brûlant et le sourire.

Dans les évènements notables de la semaine, on va dire qu'il y a Les bien-aimés (j'ai envie d'aller voir l'avant-première demain mais ça ne serait pas sérieux du tout) et la fin de la rédaction de la thèse (aussi impérative que la vapeur pour le riz, d'où l'hésitation pour l'avant-première).

Edit du 22 août à 23h59: je n'aurais jamais dû sacrifier deux heures de travail aux Bien-aimés. Je crois que je n'aime plus beaucoup Christophe Honoré. Ca fait tout bizarre!

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mardi 9 août 2011

Ce pull à col en V, que tu portais souvent les jours fériés (billet à clés)

-un vase suédois qu'il avait trouvé à Paris quand il y passait quelques jours sans moi. Il l'avait immédiatement décrété comme indispensable et il donna un charme supplémentaire à nos retrouvailles. Plus tard, dans une boutique fermée à Amsterdam, le jour où nous allions quitter la ville, nous en avons croisés plusieurs de la même créatrice mais aucun n'égalait celui-là
-les journaux que je tiens depuis l'âge de douze ans parce qu'une prof de français toujours un peu trop fardée nous avait fait étudier un extrait des Mémoires d'une jeune fille rangée. Je l'avais naïvement crue quand elle avait affirmé d'un ton docte que tous les grands écrivains avaient tenu leur journal. Le premier cahier était violet et contient des anecdotes acides sur le quotidien de mon détestable collège ainsi que plusieurs pages assez tristes sur des amours déçues. Après, ce fut un cahier avec James Dean en couverture (n'importe quoi), un autre, très épais, avec un motif de tissu indien (?), plusieurs très simples de couleurs sourdes et juste lignés quand je me suis mise à détester les carreaux puis celui avec des coeurs (?) commencé pendant mes quelques semaines d'hypokhâgne, enfin les Moleskine impérativement noirs à couverture rigide
-une cape en laine bleu marine avec une capuche et trois boutons en bois, parce qu'elle est bien chaude et donne l'impression de vivre à une autre époque
-un bonnet en grosse maille grise, chaud, doux et solide
-mes mini instax préférés (la plage de Biarritz façon Martin Parr, le pique-nique le soir de son anniversaire, quand j'avais planté des bougies sur le crâne de nounours à la guimauve et que tous le square a applaudi quand il les a soufflées, tous les portraits, les rues, les nourritures, les cafés à New York, un bouquet de pivoines dans une vitrine parisienne etc)
-une théière Acapulco qui, à l'occasion, peut servir de vase. Mais je me demande si je ne préfère pas la théière chinoise couleur jade en forme de potiron
-le premier disque de Vincent Delerm parce qu'il est dédicacé (ahem). Ce jour-là, il m'avait dit qu'il aimait bien Conte d'Eté aussi même s'il y avait Melvil Poupaud. Le lendemain, il me dira "Ah, c'était toi hier, la fille qui aime Rohmer! Comment tu vas?"
-Cinema Table parce que j'aime sa lumière, ses cadrages, son mystère. J'aime les pancakes et la tasse de café sur la nappe en crochet, j'aime les oeufs brouillés qui patientent sur la gazinière, j'aime les eggs sandwiches à côté du petit bouquet de tournesols. Et puis il réunit deux de mes principales préoccupations!
-deux clichés de lui, un cornet de glace devant le carroussel un jour où j'avais le polaroïd avec moi et à la station Notre Dame des Champs déserte au milieu de la nuit devant une affiche qui annonce la prochaine expo du Palais de Tokyo
-la lampe à abat-jour bleu ciel rapportée précieusement de Budapest, on l'avait trouvée chez un antiquaire qui avait aussi un formidable ventilateur en plastique blanc et rouge
-la lampe trouvée à Deauville dont j'aime le bois couleur miel, la peinture grise sur le socle et l'interrupteur qui ressemble à un microscopique gâteau
-la carte au dos de laquelle il avait dessiné une poupée et un petit robot
-mes photographies les plus chères prises avec le Minolta (menue monnaie américaine sur la table du dinner en Louisiane à côté du flacon de sirop d'érable et du pot de sucre cabossé, photomaton qui tombe dans le réceptable prévu à cet effet -Your pics here in four minutes- à la Cinémathèque française le jour de l'expo Kubrick, accumulation de caissettes et de napperons en papier de pâtissier chez Martine Camillieri, et d'une manière générale, toutes les images new yorkaises comme la façade du beau cinéma à Brooklyn Heights)
-un robot en caoutchouc, fluorescent!
-le livre de cuisine de Marguerite Duras parce qu'il est rare et avait été recherché et offert avec les plus affectueux sentiments
-mon sac en cuir violet que j'avais choisi après beaucoup d'hésitation parce que j'aimais bien aussi le vert jardin et le bleu foncé. Il peut contenir l'indispensable: un porte-monnaie, un baume à lèvres, une paire de clés, quelques mouchoirs, un passeport
-mon Minolta acheté par mon grand-père quand nous sommes arrivés en France dans les années 80, mon polaroïd offert par G. et dont j'adore le bouton rouge du déclencheur, l'instax de mon anniversaire, emballé par ses soins dans du papier rose et déballé par mes mains fébriles dans le petit salon du Coquillage -des enveloppes Bookbinders à fleurs bleues très britanniques mais pourtant achetées à Stockholm
-des lettres de personnes précieuses (il ne figure sur la photo qu'un échantillon des deux immenses sacs que j'ai à cet effet dans mon bureau)
-ma petite baleine en cuir rose, dont j'aime le large sourire, avait été désirée un soir dans une vitrine et retrouvée le lendemain à côté de mon assiette dans du papier orange retenu par des rubans très fins

C'est Emilie qui a égayé une nuit de garde pas tout à fait réjouissante en m'envoyant un lien vers ce site. J'aime l'idée de transformer une représentation angoissante en une accumulation revivifiante dans les souvenirs qu'elle fait affleurer.

A bientôt! (je ne suis pas précisément très en avance dans la rédaction de ma thèse)

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